Les bureaux de vote ont ouvert en Ecosse
Le
camp du « yes » tient undernier
rassemblement ce
mercredi
soir dans le grand parc
The Meadows, au pied de la prestigieuse
université d’Edimbourg.
Erik Kruse, 22 ans, étudiant
à Glasgow qui termine ses
vacances
en famille ici, distribue des
prospectus en faveur de l’indépendance.
«
C’est la démocratie. Nous
voulons gérer nos propres affaires.
Aujourd’hui, les intérêts del’Ecosse
ne sont pas défendus parLondres.
Nous sommes beaucoup plus
de gauche. L’identité écossaise,
c’est juste une base »,
résume-t-il.
Plus loin, Alisson Neathey,
52 ans, milite pour le « oui » avec
les Verts.«
Je n’ai rien à faire du
nationalisme,
dit cette... An
glaise
d’Edimbourg.Ce
n’est pas une
question ethnique.
Mais d’autodétermination,
donc de démocratie.
»
Pour
elle, Londres, c’est le gaz
de schiste, les armes atomiques,
les inégalités croissantes.
Un
gars arbore un t-shirtWestminster
Scum racailles.D’autres mouvements
indépendantistes d’Europe
sont venus les soutenir –la
N-VA devrait arriver plus tard.L’accord
pour tenir ceréférendum
avait été scellé en octobre 2012
entre David Cameron et Alex Salmond,
le Premier ministre britannique
et celui du gouvernement
régional écossais. Le leader
du
Scottish National Party, le parti pro-indépendance
de centre gauche,
venait de triompher aux législatives
de mai 2011.Le SNP avait
décroché la majorité absolue.
Un
quasi plébiscite.Les
deux hommes se sont engagés
à respecter le résultat de ce référendum
existentiel. Quoi qu’il advienne.
A l’époque, David Cameron
était persuadé de remporter
le pari, accepté à contrecœur.Rien
n’est plus sûr aujourd’hui !
Pour
Salmond, cette consultation
populaire représente une opportunité
que l’on ne rencontre qu’«
une fois dans sa vie ! » « Je vous
en prie, ne brisez pas cette fa-mille
», a
rétorqué Cameron, dans une
ultime tentative de plaider l’unité
à Aberdeen, la pépite pétrolière
du Nord. Quel que soit le résultat
de la consultation populaire,ce
sera... la douche écossaise pour l’autre
camp. Soit, grosso modo,pour
la moitié de la population.
Car
les derniers sondages donnent le
« oui » et le « non » au coude-à-coude,
avec un léger avantage pour le
maintien de l’union, mais avec une
marge d’erreur importante et de
nombreux sondés qui ne se prononcent
pas. La compétition entrele
« Aye » et le « Nay » s’annonce extrêmement
serrée. En
ville, l’intense campagne menée
par les deux clans a laissé des stigmates.
Les habitants portent lebadge
de leur camp. Quelques drapeaux
du « Yes » pendent aux fenêtres.
Des affichettes aussi. Des No
thanks.
Ou 'Le
futur de l’Ecosse dans
des mains écossaises'.
Une voiture
des indépendantistes remonte
bruyamment l’avenue.Dans
l’ensemble de l’Ecosse, plus
de 4 millions d’électeurs –4.285.323
précisément – se sont inscrits
pour participer au référendum
de ce jeudi. Un record : jamais
une joute électorale n’a suscité
pareil engouement en Ecosse,peuplée
de 5,3 millions d’habitants.
Et pour cause... Le scrutin est
ouvert aux Ecossais, mais pas seulement
: tout résident régulier en
Ecosse, citoyen européen ou du Commonwealth,
est invité à s’exprimer.
Et les jeunes de 16 et 17 ans pourront
également s’exprimer, soit
124.000 nouveaux électeurs.
Le
vote débute à 7 heures locales (8h,
heure belge) pour s’achever à 22
heures locales. Le dépouillement
des résultats engrangés dans 5.579
isoloirs répartis dans les 32 assemblées
locales d’Ecosse pourra
alors commencer. Les autorités veulent
un scrutin incontestable :la
rapidité de l’annonce n’est pas la priorité.
Les comptages serontcentralisés
à Edimbourg, sous la férule de Mary Pitcaithly, chief counting officer
Le verdict final est
attendu ce vendredi, à l’heure (floue)
du petit-déjeuner.Si
le « oui » l’emporte, après plusde
307 ans de vie commune, le divorce
ne sera pas consommé immédiatement.
S’ouvriraient alors dix-huit
mois d’âpres négociations entre
Londres et Edimbourg. Avecune
énorme pression pour aboutir à
un arrangement raisonnable.L’indépendance
effective est planifiée
pour le 24 mars 2016. Sauter
dans l’inconnu ? La liste des
questions sans réponse est interminable.
Les unionistes jouent sur
l’isolement d’une Ecosse indépendante,
qui aurait «
à tout recommencer
de zéro », renégocier son
appartenance «
à tout, de l’ONU
à l’Otan » Et les Ecossais ne
pourraient plus jouer à la Loterie
nationale... Mais voilà qui ne devrait
pas nécessairement effrayer
ce peuple de « fiers lanceurs de
troncs d’arbre qui en ont sous le kilt
», selon les clichés ! Pourtant,
jeudi dernier, la Royal Bank of Scotland, l’une des plus grosses
institutions bancaires d’Europe,
secouait le clan des indépendantistes
: en cas de victoire du
« oui », la banque évacuerait Edimbourg
pour déménager son siège
en Angleterre. Un séisme pour
une « vieille dame » basée en Ecosse
depuis 1727 ! La crainte d’autres
délocalisations pourrait jouer
en faveur du « non ».
L’économie
est au cœur des débats.
Le choix des électeurs sera avant
tout guidé par la conviction que
l’Ecosse deviendra plus prospère,
ou non, avec l’indépendance.Suivent
des préoccupations moins terre-à-terre.
Comme l’identité écossaise
(plutôt que britannique),la
démocratie ou le « rejet », plus ou
moins affirmé, de la « domination
de Westminster », forcément
mal
perçue en Ecosse... où l’on relève
que le PIB par habitant est supérieur
à celui du Royaume-Uni.«
Pour nombre d’Ecossais, les gouvernements
de ces dernières années
(à Londres) ont été trop libéraux
s’agissant de l’économie et beaucoup
trop proches des idées du secteur
des services financiers et de la
City »,relève
le chercheur Joachim
Fritz, de la fondation
Bertelsmann.
L’Ecosse a le cœur à gauche,
quand Londres est dirigé par
les conservateurs et les libéraux-démocrates.Mais
à l’entrée de The Meadows, Stuart
Ritchie, rigole de l’argument.
Ce jeune Edimbourgeois de26
ans milite pour le Better Together.«
Le Royaume-Uni est le second
donateur d’aide au développement
du monde. Et nous sommes ici
pour protéger l’Etat-Providence.
Face aux risques du « oui »,il
vaut mieux rester dans la famille.
Il y a trop de risques ».Il
reste un demi-million d’indécis,
selon estimations du week-end dernier.«
Dans les tout derniers sondages,
en retirant les indécis, le «
no » a un léger avantage. Mais s’ils
sont encore indécis aujourd’hui,
c’est probablement qu’au dernier
moment, ils voteront pour le
statu quo plutôt que pour le saut dans
le vide,
nous dit le politologue
Daniel Kenealy, de l’université
d’Edimbourg.En
même temps,
il y a tellement de gens qui voteront
pour la première fois que
c’est une inconnue. Cela a pu fausser
les sondages. Je ne parierais
pas là-dessus ! »
Ce soir, l’issue
reste incertaine. Suspense.
■
PHILIPPER
R
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